L’acétoïne (3-Hydroxybutanone) est une molécule présente à l’état de traces dans de nombreux aliments, tels que les raisins, les bananes, le miel ou le café. C’est aussi l’une des molécules qui confère au beurre sa saveur caractéristique et c’est à ce titre qu’elle est fréquemment utilisée dans les produits lactés et de boulangerie-pâtisserie. D’autres secteurs comme la cosmétique, la parfumerie ou les détergents utilisent également cette molécule à haute valeur ajoutée, notamment comme précurseur chimique.
L’offre actuelle d’acétoïne commerciale provient en grande partie de méthodes de synthèse chimique à partir de matières premières fossiles. Les ressources fossiles devenant de plus en plus rares, des efforts considérables ont été déployés pour développer la production naturelle d’acétoïne à l’aide de procédés biologiques utilisant des micro-organismes. Cependant, la productivité et la qualité du produit sont généralement insuffisantes.
L’équipe du Centre d’excellence Dowstream Process Design de LIST s’est donc donné le défi de développer une approche compétitive de la production d’acétoïne à partir de la fermentation afin de satisfaire aux exigences réglementaires (pureté > 95 % pour l’agro-alimentaire) et d’éviter toute utilisation de solvants organiques pour la récupération du produit, en particulier dans un contexte de durabilité et d’étiquetage « naturel ».
Une faisabilité technique démontrée
Lors du 5ème Congrès international sur « l’extraction verte de produits naturels » organisé par l’Université de Technologie de Compiègne (UTC) en octobre dernier, Anne-Sophie Pernak a présenté un procédé alternatif sans solvant pour la récupération de l’acétoïne au sein de milieu de fermentation. « Nous avons démontré que dans des conditions optimales de température et de vide, la pervaporation(1) au moyen de membrane hydrophile permet d’obtenir une solution concentrée avec une pureté d’acétoïne d’au moins 70%. Combinée à une étape de distillation, un produit final d’une pureté supérieure à 98% a été obtenu, validant ainsi la preuve de concept », explique Anne-Sophie Pernak. En amont du procédé, une étape de prétraitement du milieu de
fermentation par nanofiltration a permis une meilleure stabilité de l’alimentation de l’unité de pervaporation.
La robustesse de ce procédé breveté a été évalué à l’échelle pilote à partir de plusieurs lots de fermentation au sein de la business unit Ennolys by Lesaffre.
« Nous sommes fiers d’avoir prouvé la faisabilité technique de l’obtention d’une qualité naturelle d’acétoïne avec une pureté exceptionnelle. Aujourd’hui, ce procédé reste malgré tout peu compétitif par rapport au procédé de synthèse chimique, notamment au regard du rendement global d’extraction et de la longévité des membranes utilisées, mais d’autres études sont déjà en cours pour relever ces défis », conclue Anne-Sophie Pernak.
(1) La pervaporation est un procédé qui combine la séparation par membrane et l’évaporation sous vide