Comment la fermentation et la biotechnologie viennent renforcer le système immunitaire des volailles d’élevage

Si la vaccination des animaux permet d’endiguer la propagation des maladies, le recours à des solutions nutritionnelles de fermentation avancée permet, en complément, de renforcer leur flore intestinale et d’optimiser l’efficacité de leur système immunitaire. Alain Riggi, vétérinaire, nous explique comment le bien-être des volailles d’élevage peut ainsi être optimisé.

Avant d’acheter de la viande, nombre de consommateurs se soucient des conditions dans lesquelles les animaux ont vécu. Dans une démarche d’amélioration continue du bien-être animal, des pratiques ont été mises en place dans les élevages pour préserver les animaux du stress et mieux prévenir les maladies. Si la vaccination permet d’endiguer la propagation des maladies, le recours à des solutions nutritionnelles de fermentation avancée permet, en complément, de renforcer la flore intestinale des animaux et d’optimiser l’efficacité de leur système immunitaire. Le point avec Alain Riggi, vétérinaire et directeur technique du secteur volailles de la Business Unit Phileo chez Lesaffre.

Pour éviter le développement de maladies liées à des agents pathogènes dans les élevages aviaires, des mesures sanitaires peuvent être mises en place. Une bonne hygiène du site, une densité d’animaux contrôlée, un vide sanitaire périodique complet, et une bonne qualité de l’eau et des aliments, en sont les ingrédients de base. « L’usage régulier d’antibiotiques, donné en prévention dans les eaux de boissons des poussins, est une fausse bonne idée, prévient Alain Riggi, directeur technique du secteur volailles de la Business Unit Phileo chez Lesaffre. Il en résulte une destruction de la plupart des bactéries intestinales, même des non-pathogènes. Cet apport d’antibiotiques retarde ainsi l’équilibre de la flore des jeunes poussins de plusieurs jours, alors même que celle-ci devrait jouer son rôle de barrière face aux agents pathogènes et être équilibrée au bout de 15 jours à 3 semaines». L’usage répété d’antibiotiques favorise aussi l’émergence de bactéries résistantes, un problème mondial de santé publique à ce jour. Aussi, les règles sanitaires qui présidaient autrefois à la conduite des élevages subissent aujourd’hui une mutation majeure. L’intérêt se porte désormais sur les processus naturels qui favorisent les mécanismes de défense biologique des animaux et qui préservent l’intégrité de la chaîne alimentaire.

Équilibre et diversité de la flore intestinale, des atouts contre les agressions externes

Chez les volailles, plusieurs barrières permettent à l’organisme de limiter les infections avant toute mise en action du système immunitaire. Des barrières mécaniques, des barrières physico-chimiques et des barrières microbiologiques. Présentes dans la peau, le tractus digestif, le système respiratoire et reproducteur, les cellules épithéliales sont au cœur de l’immunité. « Les parois de la trachée et des bronches sont tapissées de cellules épithéliales à cils vibratiles pour expulser les poussières. Elles sécrètent du mucus, capable de piéger et d’évacuer nombre de bactéries pathogènes. » Ces cellules sécrètent aussi des substances antibactériennes, les défensines.

Côté intestinal, la microflore composée chez les volailles entre autres de Lactobacilles, de Firmicutes et de Clostridiums non pathogènes, produit des acides lactiques et butyriques. Elle modifie ainsi le pH local et crée un environnement défavorable aux pathogènes. Ce microbiote intestinal, naturellement présent dans les muqueuses, contribue également à protéger ces animaux d’élevage contre les agents pathogènes via l’effet barrière : « en adhérant à la muqueuse intestinale, les bactéries commensales – c’est-à-dire bénéfiques – de la flore intestinale empêchent, par compétition, les autres micro-organismes pathogènes de coloniser l’intestin ». Il existe donc une relation étroite entre la flore intestinale et l’immunité du tractus intestinal. Ainsi, plus la flore commensale est diversifiée et équilibrée chez les volailles, et moins elles risquent de contracter des maladies. « Et pour maintenir les élevages de volailles en bonne santé, cette diversité doit être présente chez le plus grand nombre d’animaux au sein d’un lot », précise Alain Riggi.

Des fractions de levure, faisant partie des postbiotiques, pour prévenir d’éventuelles infections

Administrés directement sous forme de poudres dans l’aliment complet ou dans les prémix destinés à l’alimentation des volailles, « les fractions de levures provenant de la fermentation avancée peuvent moduler positivement la composition du microbiote intestinal et renforcer son effet barrière », révèle Alain Riggi. Plusieurs modes d’action existent pour les postbiotiques : les fractions de levures peuvent « stimuler la croissance des cellules qui produisent le mucus intestinal, favoriser la croissance en hauteur des villosités intestinales, ou agir sur le maintien des jonctions serrées entre les cellules intestinales pour éviter le passage des bactéries pathogènes ». Ils améliorent ainsi la fonction de la barrière intestinale.

Ces fractions de levures peuvent aussi capter des bactéries pathogènes, comme les Salmonelles, qui possèdent à leur surface des fimbriae, ou encore appelés pili, et se lier avec elles via un de leur composants principaux, les mannanes. Ils forment alors des complexes qui seront ensuite évacués grâce aux mouvements péristaltiques de l’intestin. « Ce mécanisme réduit de 1 à 2 log (90 à 99 %) la quantité de ces bactéries pathogènes intestinales », énonce Alain Riggi. Les solutions de fermentation avancée participent aussi à la lutte contre d’autres bactéries, telles que Clostridium perfringens, responsable de l’entérite nécrotique, maladie bactérienne courante chez le poulet.

Des fractions de levure postbiotiques pour renforcer le système immunitaire

Si malgré toutes ces barrières, un pathogène entre dans l’organisme des volailles, ce sont les cellules du système immunitaire qui prendront alors le relais. Chez le poulet comme chez les mammifères, la réponse immunitaire comporte deux volets : la réponse non spécifique (innée) qui intervient dès le premier contact avec un agent pathogène potentiel, et la réponse adaptative (cellulaire ou humorale) qui prend le relais de l’immunité innée, avec des lymphocytes provenant entre autres de deux organes spécifiques : le thymus et la bourse de Fabricius.

Les fractions de levures sont susceptibles d’interagir avec le système immunitaire : leurs composants principaux (les mannanes et les béta-glucanes), grâce à leur structure chimique, sont reconnus par des récepteurs présents à la surface de cellules immunitaires tels que les macrophages (grosses cellules issues d’un monocyte du sang, douées du pouvoir de phagocyter des particules étrangères) et les cellules dendritiques. Ces dernières sont présentes sous l’épithélium intestinale et sont capables de développer des évaginations (sortie d’un organe en dehors de sa cavité naturelle) à travers cet épithélium pour détecter les pathogènes dans la lumière intestinale. Il s’agit alors d’une mise en alerte spécifique du système immunitaire. Cette interaction avec le système immunitaire permet à ce dernier de rester en état d’alerte et de réagir plus efficacement et plus rapidement face à une infection virale ou bactérienne.

Dans ce cadre, les fractions de levure peuvent aussi être utilisés pour « renforcer la réponse vaccinale et obtenir une meilleure protection des animaux ». Dans ces élevages, la vaccination a une utilité avérée : elle limite les conséquences économiques des maladies infectieuses en permettant la prévention et le contrôle de certains virus hautement pathogènes. En réduisant ainsi la charge virale dans l’environnement, elle permet d’éviter le risque de maladie grave chez les volailles et de réduire la probabilité d’une maladie zoonotique et les risques d’exposition humaine. Améliorer la réponse vaccinale grâce à des fractions de levures permet ainsi d’améliorer directement la performance de l’élevage et d’assurer la sécurité sanitaire du consommateur.

Lesaffre aux côtés des éleveurs pour répondre à leurs besoins

« Dans la Business Unit Phileo de Lesaffre, nous essayons avant tout de comprendre ce dont ont besoin les éleveurs, afin de développer pour eux des solutions sur mesure en matière de soins préventifs, souligne Alain Riggi. Que leurs poulets soient stressés par les bactéries présentes dans les eaux de boisson, par des aliments de mauvaise qualité aux matières premières trop abrasives, ou qu’ils souffrent de désordres intestinaux, nous proposons une approche globale basée sur une étude de risques, afin de rendre leurs animaux plus résistants et plus résilients. »

Cette approche permet aussi de résoudre les problèmes de stress des animaux d’élevage et d’améliorer par là-même l’efficacité alimentaire. « Grâce à nos produits, l’éleveur peut arriver à un poids cible de ses volailles en leur donnant moins d’aliments, ce qui diminue l’empreinte alimentaire de son élevage, et lui assure un gain en coûts de production, mais réduit aussi les ressources utilisées pour son élevage, et donc son impact environnemental ».

Fort de plus de 170 ans de recherche et d’expertise industrielle sur les micro-organismes, Lesaffre propose une gamme diversifiée de produits bénéfiques, allant des fractions de levures (surtout utilisées chez les volailles), aux levures vivantes (chez les ruminants et les porcs), en passant par des solutions mixtes de bactéries et de levures. Système immunitaire, santé intestinale, stress, production de viande, de lait, fertilité, prévention des Salmonelles, présevrage… Autant de critères sur lesquels travaillent les collaborateurs Lesaffre au sein des plateformes de recherche et d’innovation de Loos, afin d’assurer le bien-être animal et la sécurité alimentaire du consommateur, tout en contribuant à réduire la résistance aux antibiotiques et l’empreinte carbonée des élevages.

Pour en savoir plus, découvrez en vidéo le lien entre le microbiome d’un animal et son immunité et comment les modèles in vitro font aujourd’hui progresser la recherche dans ce domaine ?

 

Les fractions de levures provenant de la fermentation avancée peuvent moduler positivement la composition du microbiote intestinal et renforcer son effet barrière
Alain Riggi
Vétérinaire et directeur technique du secteur volailles de la Business Unit Phileo chez Lesaffre